mardi 30 octobre 2012

Tout le monde e(s)t un artiste.



Tout le monde e(s)t un artiste.
Voila comment je conçois le monde.

Je crois à l’intelligence collective même si l’artiste est unique. Il est un détonateur un accélérateur de particule. Nous sommes fait  d’effet de masses et de répétions  et pourtant les différences surnagent. Regardez ce pécheur à la ligne.

Il est semblable à ses semblables. Ni son apparence, ni sa technique divergent des autres pécheurs. Et pourtant qu’est ce qui le fait veiller si tard au bord du fleuve ? Qui connait son vrai objectif, sa vraie proie ? Nulle truite ne le fait rêver. Sa quête est on ne peut plus poétique, c’est la Lune et son reflet qu’il veut attraper. Ceux qui le connaissent l’appellent Pescalune.

Encore un fada. Un de plus, dans ce bas monde. Non, l’illuminé à l’épuisette ce soir est en train de révolutionner le monde. Il n’est pas sans charme. Son esprit vacille bien trop vite pour le commun des mortels et pourtant tout le monde peut comprendre son message. Il est une sorte de précurseur. Un genre nouveau taillé dans d’ancien tissu. Il est fait de pacotille. Il ressemble ici en rase campagne à un épouvantail. Il se prend pour un lonesome cowboy. Il va faire émoustiller les masses d’ici peu. 

Action, réaction. La physique est bien connue. Toute sa vie il n’a fait qu’observer. Rien ne peu le distraire maintenant. C’est bon signe. Il a de la suite dans les idées. Tout est clair maintenant. Il attend juste le bon moment. L’apothéose est proche. Il le sait. Ce n’est qu’une question de jours, voire d’heures. Il veille avec attention. Sur le qui vive, pré à tout…

Sur une autre rive, pré de là le monde, suit son cour. Les masses informes cherchent une nouvelle distraction. Elles l’auront puisque la nature a horreur du  vide, la société du spectacle sait se régénérer. Son vitalisme est décapant ; elle agonise la société du spectacle et ça lui sert à trouver de nouvelles figures, à renouveler son cirque. Elle fait du neuf avec du vieux. Elle pue très fort et n’accepte pas les odeurs des autres. Les masses moisies sont son terreau de prédilection. Le marché aux fleurs du spectaculaire intégrée : c’est devant vous, trois vielles idées décousues à vendre au plus offrant. Ça rapporte toujours quelques choses, et puis les gens en redemandent. La société aiment ça, ça lui sert bien. Circulez brave gens, vous verrez mieux dans votre petit confort douiller la vie des autres s’étaler.

Le pécheur de Lune est loin de ces préoccupations. Il cherche le moyen. Celui de faire disparaître le reflet de l’astre nocturne. Il voudrait le capturer dans un maigre filet. Parfois il le tient à main nu, mais il glisse alors très vite. Le reflet est plus fort que tout. Un jour le pécheur s’attaquera à l’émetteur d’image lui-même. Il projettera ainsi ses rêves dans un ailleurs. Il lui faudrait trouver des espaces vides dans sa tête pour emmagasiner toutes ces nouvelles sensations. C’est dur d’expérimenter chaque fois une  inédite tentative et de ne pas pouvoir comme il le faudrait valider ou non les hypothèses de départ. Il travaille comme un scientifique, mais un scientifique sans mémoire ni calepin. Il a perdu depuis très longtemps son carnet de notes. C’est pour ça qu’il répète. Il rabâche.

Mais qui pourrait lui en vouloir. D’ailleurs il indiffère tout le monde. C’est bien drôle son histoire, mais ça n’amuse personne.  Il vit dans l’indifférence la plus totale. Matin comme soir, il passe devant tant de gens qui ne le voit pas. Même les enfants se sont layer de le moquer.

Les masses attendent ouvertement une nouvelle manière de voir les choses. Elles sont avides de nouvelles théories. Ce n’est plus comme avant, où on mettait sur la croix les messagers de bonnes nouvelles. Il est fini ce temps là, on a inversé les valeurs, on cherche des révolutionnaires à tout les coins de rue. Et plus on cherche, plus on se contente de fausses idoles. Non on ne s’en contente pas, on les fabrique ouvertement. C’est ça le nihilisme de l’époque. La nouveauté avant tout.
Le pécheur de Lune est loin de nous autres maintenant. Son esprit vagabonde. Il est retourné un instant à la ville pourtant. Pour des tâches bien administratives, on veut lui montrer qu’on ne l’a pas oublié, qu’il ne peut se soumettre à la réalité, la société doit rester la plus forte. Il courbe  l’échine, son dos rond est une volute  anarchisante. Il n’a rien d’un esclave, il respire même la noblesse mais ce n’est pas maintenant qu’il doit faire preuve de caractère, pas aujourd’hui. Il est un fin stratège, sa patience est son arme fétiche. Sa virevolte sans cesse dans son esprit, mais en ce moment il se calme. Il sait que lui seul pourra bander l’arc d’Ulysse. Alors il se cache déguisé en mendiant. 

Gammes


Ligne de fracture, elle le scrute sous un ciel morose. Leurs premiers pas,  leurs premières paroles détermineront la suite de l’histoire. Lui regard inquisiteur même masqué de lunettes noires, ne risque pas de la mettre en confiance à moins que…   toujours en chasse, encore bredouille ? La faille est toujours trop grande, l’effarait ? S’enfuira-t-elle, elle aussi ? Le visage lézardé, fausse décontraction ou stupide concentration… elle à l’opposé intriguée s’imaginerait déjà happée si seulement… seul encore ce soir ?
Le mur a du fruit,
Désobéir
A  soi
Pour assoir ? Rien de moins qu’un nouveau plan de bataille, les bases d’une continuelle nouvelle danse.
Son image dessus, en quête de sens  dessous…
Sa situation était des plus houleuses, tout était bien établi
Sa position toujours dominante, au milieu du gouffre
Sa vie un long fleuve sans méandre
Calme plat jamais perturbé que par des règles, des lois que  seul lui semblait vivre
Demain c’est sur il commence enfin comme tout les lendemains sa position sera située sur un autre plan une autre dimension mise en perspective nouveau tour de vice.
Peur, fascination, peur fascination, faim, fin de la peur, rupture de da fascination, situation,  amour, libération
Désobéissance. Action
In situ :
à mille lieux, le lendemain
Quand a-t-il donc changé ? Pourquoi ce soir là rien ne fut pareil ?
Tout sera-t-il donc de nouveaux ainsi ?
Pour l’instant rien à redire, vivre l’instant.
Simple pause ou nouveau départ. Surtout ne rien demander, aucune explication…
Ne plus chercher ce qui arrive à point,  fuite dans le temps…
Il a soupiré, si peu cette fois là. Tout en apnée le long de son petit discours. Rien de plus. Sec aussi. Verre à la main droite, gauche baladeuse…La peur prise en étau. Rien de moins. Less is more. Laisse c’est mort. Un simple mur de glace, sens cesse devant soi, sans porte ni fenêtre ; les murs sont faits pour s’écrouler la glace fond déjà…la condensation rafraichit son esprit.
A la manière deux. Imitation primordiale, le verbe sourira. Fenêtre sur le grand  paysage. L’inspiration est comme un souffle, la musique jaillit ses premières notes. Qui s’en plaindra?

La Stratégie du Jouer de Go




                   

L’artiste plasticien Daniel Dezeuze, ancien membre cofondateur du groupe Support-Surface ironise sur la mode et le besoin absolu aujourd’hui d’être connecté: « je ne sais quel artiste contemporain soutient que si vous n’êtes pas connecté, vous êtes condamné à l’autisme(…).Ainsi va la mode d’un côté l’artiste de l’autre  l’autiste-plasticien, espèce de représentation honteux d’un degré zéro de l’interactivité ». Sa conception de l’artiste et de sa relation avec le monde serait-elle incompatible avec celle du blog de l'agence e(s)t? Notre site a pour vocation de créer un réseau et la chronique la Stratégie du Joueur de Go cherche à défendre la multiplicité des singularités.
Pour Dezeuze, le contre exemple absolu à l’artiste emprisonné dans son réseau de communication moderne c’est le lettré chinois ancien : peintre, calligraphe et/ou poète. « Chez les lettrés chinois perdus dans leurs montagne, l’on ne retrouve aucune idée  de sacrifice, aucune trace de l’ascétisme dévouée à une entité transcendante, mais plutôt une manière de cultiver un microcosme et de concentrer son esprit, lequel devient aussi dur qu’un caillou qui, lancé à la surface de l’eau forme des ondes concentriques » 
Ce caillou dont parle Dezeuze n’a en apparence rien à voir avec un jeton du jeu de go, un jeu de  stratégie chinois, puisque que le lettré  est souvent sorti volontairement du jeu. « Certains coupèrent tout lien avec leur responsabilité politique, souvent considérable. Ils auraient pu continuer à briller à la cour, mais en fait de compte ils ne s’accommodent ni des intrigues, ni des honneurs. ( ...) Nombreux sont ceux qui choisirent de fuir et de se fondre dans le paysage. »
Aujourd’hui l’isolement peut devenir bien plus paradoxal. Même isolé dans sa montagne, le lettré d’aujourd’hui peut, sans s’aliéner à la communication perpétuelle, jouer le jeu de l’intrigue le plus silencieusement du monde grâce aux nouvelles technologies. Son esprit-caillou peut maintenant devenir un jeton de go. Il peut alors à la foi garder sa singularité et refuser toute hiérarchisation sociale tout en restant dans la partie. Dans le jeu de go contrairement aux échecs, toutes les pièces ont la même valeur, seule leur place relative entre elles compte. Le lettré d’aujourd’hui peut en se positionnant bien sur la grille du tablier, par sa seule présence et la magie des communications modernes, tout en continuant le plus tranquillement du monde ses activités artistiques, faire changer le cours de la partie.

La Stratégie du Joueur de Go cherche à mettre en évidence les individualités et les initiatives personnelles. Sans lien apparent entre elles, leurs juxtapositions permises par un usage modéré et paradoxal des nouveaux médias,  s’inscrira dans une véritable guerre du goût. La partie contre les préjugés collectifs de l’époque, ceux-là même qui cherchent par l’emprisonnement aux communications à nier toute singularité, est lancée.



Camus, Pasolini, éthique et esthétique du football





Pasolini ballon au pied...




« Senza cinema, senza scivere, che cosa le sarebe piaciuto diventare ? Un bravo calciatore. Dopa la letteratura e l’eros, per me il football é uno dei grandi piaceri »
« Sans le cinéma, sans l’écriture, qu’aurais-je aimé devenir ? Un joueur de football. Après la littérature et l’éros, pour moi le football  est un des plus grands plaisirs »
                                                                                        Pier Paolo Pasolini

Avec Camus, Pasolini partage la passion du football, une passion rare chez les intellectuels de leur époque. Elle en dit parfois long sur leur conception de la morale, de l’étique et  de l’esthétique. Camus était goal, car enfant, trop pauvre, il ne pouvait pas user ses chaussures. Pasolini lui jouait arrière droit avec un certain talent.
« Je ne savais pas que vingt  ans après dans les rues de Paris ou de Buenos aires (oui ça m’est arrivé)  le mot RUA prononcé par un ami de rencontre ne ferait battre le cœur le plus bêtement du monde ». Camus est un homme de fidélité, le Racing Universitaire Algérois ne fait pas exception. Il  y joua jusqu’ à l’âge de 17 ans, une tuberculose interrompu sa carrière. Le RUA était un club plutôt élitiste, mais ouvert à toutes les couches de la population, un club mixte qui acceptait les musulmans. Camus explique : « On jouer dur avec nous. Des étudiants, fils de leurs pères, ça ne s’épargne pas. Pauvres de nous, à tous les sens, dont une bonne moitié était fauché comme les blés ! » 
 Arrivé dans la métropole, il supporte le Racing Club De Paris pour des raisons des plus évidentes : « Je puis bien vous avouer que je vais voir les matchs du Racing club de Paris ; dont j’ai fait mon favori, uniquement parce qu’il porte le même maillot que le RUA, cerclé de bleu et blanc. » Mais il ajoute plus finement : « il faut dire d’ailleurs que le Racing a un peu les mêmes manies que le RUA. Il  joue « scientifiquement » comme on dit, et scientifiquement, il perd les matchs qu’il devrait gagner. »
« Vraiment le peu de morale que je sais, je l’ai appris sur les terrains de football et les scènes de théâtre qui resteront mes vraies  universités ».  Chez Camus la passion du football est avant tout morale. Elle est à l’image de son œuvre où l’absurde et le destin restent implacables. «J’ai appris tout de suite qu’une balle ne vous arrivait jamais du côté où l’on croyait. Ca m’a servi dans l’existence et surtout dans la métropole où on n’est pas franc du collier.»
Face à la passion de Camus pour les deux Racing et leur jeu scientifique, on peut opposer l’admiration de Pasolini pour le jeu plus artistique de l’équipe nationale brésilienne de 1970 qui conquit  le titre de champion du monde face à l’Italie. « Le football est l’ultime représentation sacré de notre temps. Il est le rite de la fin, même si vous échapper. Alors que d'autres représentations sacrées, même de masse, sont en déclin, le football est l’unique restant. Le football est le spectacle qui s’est substitué au théâtre. »
 « Le football est un système de signes donc un langage. », une conception sémiotique que Pasolini va développer très loin. Il met en évidence des joueurs  prosateur et des poètes : Bulgarelli « prosateur réaliste » ; Riva un « poète réaliste » et Corso « un poète un peu maudit ».  Cette dichotomie prose-poésie Pasolini la retrouve dans la confrontation entre l’Italie et le  Brésil. 
Le célèbre catenacio (cadenas) ou triangulation de la squadra azzura  est un football de prose, car il est basé sur la synthèse, le jeu collectif, le code. Le seul moment poétique reste la contre attaque, le contre pied. Ce jeu s’oppose à celui de la selecção. Il est plus poétique puisque c’est du drible que né la poésie pour Pasolini. L’équipe brésilleine peut marquer à tout moment, de toutes les positions grâce à ses talentueux dribleurs. Le moment le plus poétique restent le but. Tout but est une invention, une subvertion des codes.
Mais pour Pasolini, plus que le jeu pour le jeu ou l’art pour l’art, conception flauberdienne du football, le sublime du jeu brésilien vient de la réconciliation entre efficacité et beauté du geste. Une conception kantienne de l’esthétique qu’il synthétise dans son expression “gol fatal”. Chez Kant le sublime n’est pas possible dans l’art. Le ‘fatal gol’ dépasserait la notion d’oeuvre d’art, il n’est pas imitation de la nature ni simple objet de plaisir. Il devient par sa finalité que l’homme lui porte par son regard aussi digne d’admiration que la nature. C’est en cela que le “fatal goal” est sublime.